A quelques jours des Saints de Glaces, un épisode climatique sans précédent s’est abattu sur les vignobles de France avec une ampleur géographique inédite. De la Touraine au Languedoc, en passant par la Bourgogne, Bordeaux ou Cognac... différentes vagues de gel printanier n’ont épargné presque aucune région. Le millésime 2017 n’en sortira pas indemne.
Art délicat, la production de vin est surtout dépendante des états d’âme de la météo. Et il semble bien que ravager les vignes d’un coup de gel n’ait fait ni chaud ni froid à Dame Nature, qui a fait des vignobles français son terrain de jeu privilégié.
Entre le 19 et le 29 avril, alors que certains cépages débourrent de manière précoce grâce aux douces températures du début de saison, le vignoble français a été touché par quatre graves épisodes de gel. L’ampleur des dégâts est variable d’une région à une autre et c’est un nouveau coup dur pour les vins français après le bilan très contrasté de l’an dernier.
Gel tardif en Bourgogne, maladies cryptogamiques en Val de Loire et Beaujolais, orages de grêle meurtriers en Languedoc, Bourgogne, Chablis, Cognac… rappelons-nous que rares sont les rangs de vignes ayant pu résister à la colère de Dame Nature en 2016.
Avec une production en baisse de 10% l’an passé par rapport à 2015, de nombreux vignerons portraient leurs espoirs sur le millésime 2017. Une chose est donc sûre, les récents épisodes de gel marqueront les esprits, les volumes et la bourse des vignerons.
A Bordeaux, deux vagues de froid ont suffit à toucher l’ensemble des appellations et les cépages les plus précoces comme le merlot. Le bilan prévoit une récolte réduite de plus de la moitié et conduira de facto à une augmentation potentielle des prix, selon la Chambre d’Agriculture. Considéré comme le vignoble le plus touché cette année, un tel épisode météorologique n’avait pas été connu dans le bordelais depuis 1991.
A Cognac et dans le Languedoc, plusieurs milliers d’hectares de vignes ont été ravagées. Près d’un tiers de la production est ainsi mise à mal pour ce millésime à Cognac tandis que Le Languedoc enregistre un bilan très hétérogène suivant les appellations. Après les épisodes de grêle en 2016, les vignes de l’Aude et de l’Héraut, notamment celles des appellations Cabardès, Minervois, Corbières et Malpère sont les plus durement touchées cette année encore.
C’est aussi une fois de plus la faute à pas de chance pour le Chablisien, qui n’a pu résister aux pics de froid jusqu’à -7°C, perdant ainsi jusqu’à 30% des récoltes. Quant à la Bourgogne, 3 000 hectares de vignes ont gelé, dont la moitié dans l’Yonne.
Du côté du Val de Loire, le bilan est assez contrasté, avec jusqu’à 80% de pertes selon les zones, notamment à Chinon et, dans une moindre mesure, Vouvray.
Côté est de la France, entre 20 et 35% des bourgeons ont été gelés dans les vignes de Champagne. Si le bilan est relativement grave, les vignerons peuvent se consoler avec leurs réserves faites d’une année sur l’autre pour maintenir la production d’assemblage. Les alsaciens aimeraient pouvoir en faire autant mais n’ont d’autre choix que de se plaindre auprès de Dame Nature, qui a emporté 90% des récoltes en une nuit seulement… Aussi petit soit-il, le vignoble du Jura, le « Bon Pays » comme on l’appelle là-bas, recense des gelées à 100% sur certains secteurs.
Dans la Vallée du Rhône, ce sont plutôt les vignobles du sud qui ont été atteints, parmi lesquels les Côtes-du-Ventoux et du Lubéron.
Si ce millésime sera encore difficile, le gel n’aura pas saccagé tous les espoirs : des solutions existent pour prévenir des catastrophes, à l’image des récents tests de vol d’hélicoptères à Montlouis pour brasser l’air au sol et lutter contre le gel, ou bien le brulage de paille compactée entre les rangs de vignes. Ils semblent avoir porté leurs fruits et viennent donner un peu de baume au cœur des vignerons après les lourdes pertes de 2016.